Un siècle au rythme du bocage : héritages et bouleversements
Le Pays Roi Morvan, vaste échiquier de vallées, de landes, de forêts et de prairies, étire depuis toujours ses reliefs arrondis au centre du Morbihan. Mais il faut se pencher sur les cartes de Cassini, les cartes IGN successives, mais aussi sur la mémoire des habitants, pour prendre la mesure du changement qui a transformé ce paysage en un siècle. Le bocage, autrefois le maître du territoire, en a été le fil conducteur — mais aussi le grand sacrifié de l’histoire agricole bretonne.
Pendant l’entre-deux-guerres, le Pays Roi Morvan était hérissé de haies, de talus, de chemins creux. Selon l’Atlas des paysages de Bretagne (région Bretagne, 2015), jusqu’à 75 % du territoire était alors constitué de petites parcelles closes. Ces haies étaient la clé de voûte du système local : elles organisaient l’espace, protégeaient l’humidité, dispersaient les vents, et servaient de « clôtures vivantes » pour les animaux.
Aujourd’hui, moins de 35 % des talus et haies ont survécu dans certaines communes comme Priziac ou Langonnet. Dès les années 1960, avec la généralisation du remembrement et le passage à une agriculture de plus en plus mécanisée, les bocages ont reculé, laissant place à de grandes parcelles propices à la culture intensive et à l’élevage tourné vers la productivité. Le chiffre est frappant : 7 000 km de haies ont disparu en Bretagne en cinquante ans (source : Observatoire de l’Environnement en Bretagne, 2020).